Votation populaire du 30 novembre 2025 : Initiative cantonale «Pour un salaire minimum»
Le 30 novembre prochain, la population fribourgeoise est appelée à voter sur une initiative cantonale intitulée « Pour un salaire minimum ». Le Conseil d’Etat, le Grand Conseil, ainsi que les associations patronales, recommandent de refuser cette initiative qui comporte des risques pour le bon fonctionnement du marché du travail en entravant l'intégration des jeunes et des personnes peu qualifiées notamment, et en affaiblissant considérablement le partenariat social.
En bref
L’initiative législative «Pour un salaire minimum» propose de modifier la loi sur l’emploi et le marché du travail afin d’y inscrire un salaire minimum de 23 francs de l’heure. Ce salaire minimum doit s’appliquer à toute personne qui travaille dans le canton, à l’exception des jeunes de moins de 18 ans, des apprenti-e-s et de cerraines catégories de stagiaires. Pour l’agriculture, un salaire minimum différent peut être défini.
Le Conseil d’Etat, le Grand Conseil, ainsi que les associations patronales, recommandent de refuser cette initiative.
Arguments du comité d’initiative
Les auteurs de l’initiative estiment qu’aujourd’hui, un nombre significatif de personnes salariées ne gagnent pas assez pour vivre décemment. L’introduction d’un salaire minimum vise à assurer qu’une personne qui travaille à plein temps puisse vivre de son salaire, sans devoir recourir à des prestations sociales.
Arguments des autorités
Le Conseil d’Etat et le Grand Conseil recommandent de refuser cette initiative qu’ils jugent trop extrême. L’introduction d’un salaire minimum légal comporte des risques pour le bon fonctionnement du marché du travail et l’économie. La mesure entrave l’intégration des jeunes et des personnes peu qualifiées au marché du travail. Elle affaiblit le partenariat social qui, avec la formation, est le meilleur moyen de garantir des salaires décents.
Présentation de l'objet
Le peuple est appelé à se prononcer sur l’initiative cantonale «Pour un salaire minimum». La mesure proposée par l’initiative L’initiative propose de fixer dans la loi sur l’emploi et le marché du travail un salaire minimum. Ce salaire minimum légal doit s’appliquer à toute personne qui travaille dans le canton, à l’exception des apprenti-e-s, de certaines catégories de stagiaires et des jeunes de moins de 18 ans.
Le montant du salaire minimum Le salaire minimum proposé par l’initiative s’élève à 23 francs de l’heure. Lorsque la personne n’est pas rémunérée pendant les vacances et les jours fériés, des indemnités s’ajoutent à ce salaire horaire de base. L’initiative prévoit également que le Conseil d’Etat puisse fixer un salaire minimum différent pour l’agriculture.
Les conditions d’adaptation du montantL’initiative fixe les conditions qui permettent d’adapter le salaire minimum à l’évolution des prix. Une indexation annuelle automatique du montant sur la base de l’indice suisse des prix à la consommation est prévue. Cela signifie qu’en cas d’augmentation de l’indice, le salaire minimum augmentera de façon correspondante.
La primauté sur le partenariat socialDe nombreuses conventions collectives de travail ainsi que les contrats-types de travail fixent également des salaires minimaux. Selon le texte de l’initiative, le salaire minimum légal primera les salaires minimaux définis dans les conventions ou contrats. Le salaire minimum légal s’appliquera aux personnes salariées affiliées à une convention collective de travail qui définit un salaire minimum inférieur à celui-ci, ainsi qu’aux personnes actives dans un secteur d’activité régi par un contrat-type de travail.
Les mécanismes de contrôleL’initiative précise les mesures de contrôle permettant le respect du salaire minimum légal et définit des mesures administratives en cas de non-respect.
Le texte soumis en votation populaire —Initiative « Pour un salaire minimum », texte soumis à votation en pdf
Les arguments du comité d'initiative
Vivre de son travail. Oui au salaire minimum!Le 30 novembre, nous avons une occasion unique d’améliorer les conditions de vie de milliers de salariées et salariés. En votant oui au salaire minimum, nous permettons à chaque personne de vivre de son travail.
Un travail à temps plein doit permettre de vivre décemmentSe lever tôt tous les matins, aller travailler, effectuer des tâches parfois pénibles, rentrer chez soi puis recommencer le lendemain. C’est le quotidien de nombreuses personnes dans notre canton. Mais pour une partie d’entre elles, cela ne suffit pas: payer les factures, offrir des loisirs à ses enfants ou faire ses courses est compliqué. Il n’est pas acceptable qu’une personne qui travaille à 100 % ne puisse pas vivre de son travail !
4000 francs, c’est le minimumL’initiative demande l’introduction d’un salaire minimum de 23 par heure, soit environ 4000.- francs par mois. Cette mesure concernera l’ensemble des actifs du canton à l’exception des apprentis, des moins de 18 ans, des stagiaires et de l’agriculture. Des contrôles sont prévus pour en assurer le respect. Le salaire minimum a déjà fait ses preuves dans plusieurs cantons et permet d’améliorer les conditions de vie de nombreuses personnes.
6500 personnes concernéesDans le canton de Fribourg, environ 6500 personnes verront leurs salaires augmenter. Ces personnes travaillent dans la restauration, le commerce de détail, la coiffure, les maisons de retraite, les crèches ou encore le nettoyage.
Diminuer la précaritéLa précarité touche aussi les Fribourgeoises et Fribourgeois. De nombreuses personnes comptent chaque centime, renoncent à aller chez le médecin ou peinent à se nourrir. Introduire un salaire minimum est une mesure efficace pour réduire la précarité.
D’excellents résultats dans d’autres cantonsLe salaire minimum a été introduit avec succès dans les cantons de Genève, du Jura, de Neuchâtel, de Bâle-Ville et du Tessin. À Genève, une étude de la Haute école de gestion a montré que le taux de chômage n’a pas augmenté et que les femmes ont eu plus de facilité à retrouver un emploi. À Neuchâtel, la création d’emplois a augmenté dans les années qui ont suivi l’introduction du salaire minimum.
Oui au salaire minimum le 30 novembre ! Plus d’informations: www.salaire-minimum-fr.ch
Le point de vue des Autorités
Le Conseil d’Etat est sensible à la question des bas salaires et estime que les travailleurs et travailleuses doivent pouvoir subvenir à leurs besoins par le fruit de leur travail, sans faire appel à l’aide sociale. Il n’est pas acceptable que l’Etat doive compenser, sur le long terme, des salaires insuffisants de l’économie privée pour couvrir les besoins essentiels. L’initiative «Pour un salaire minimum» ne permet toutefois pas d’atteindre ce but. Au contraire, elle comporte des risques pour le bon fonctionnement du marché du travail et affaiblit le partenariat social.
L’insertion professionnelle entravéeL’initiative prévoit que tous les salarié-e-s de plus de 18 ans qui ne sont pas en formation doivent bénéficier du salaire minimum. Si elle est acceptée, les jeunes sans expérience professionnelle préalable rencontreront plus de difficultés pour trouver un emploi. Le salaire minimum légal risque également de freiner l’insertion professionnelle des personnes peu formées, par exemple celles qui n’ont pas achevé une formation professionnelle initiale.
Un montant élevé en comparaison intercantonaleLe salaire minimum proposé, de 23 francs de l’heure, est élevé en comparaison inter-cantonale. Il s’agit du deuxième salaire minimum le plus élevé de Suisse, après celui du canton de Genève. Son introduction pourrait amener certaines entreprises à augmenter leurs prix afin de pouvoir compenser la hausse des coûts du travail, et peut-être à supprimer des emplois. En tenant compte des circonstances internationales actuelles, il n’est pas raisonnable de les péjorer davantage.
Un mécanisme d’augmentation rigide En cas d’inflation, le montant du salaire minimum devrait être adapté à la hausse, même pendant une période de crise économique et de hausse du chômage. Une telle situation serait contraire aux buts poursuivis par l’initiative, à savoir la protection des travailleuses et travailleurs. Il serait plus difficile pour les entreprises de maintenir ou de créer des postes de travail.
Des exceptions lacunairesDans les domaines de l’asile, de l’aide sociale et de l’assurance-chômage, il existe de nombreux programmes en faveur de l’insertion professionnelle. Ces programmes sont par exemple destinés aux personnes en situation de chômage de longue durée, de handicap ou de vulnérabilité sociale. L’initiative n’en tient pas compte. Elle n’exclut pas non plus les jobs d’été pour étudiant-e-s.
Un partenariat social affaibliLa régulation des conditions de salaire et de travail repose sur le partenariat social. Un des avantages de ce système est sa flexibilité et sa capacité à prendre en compte les différences entre les secteurs économiques et les régions. Si l’initiative était acceptée, la marge de manœuvre des partenaires sociaux serait fortement réduite.
Des instruments efficaces contre la sous-enchère salarialePour lutter contre la sous-enchère salariale, plusieurs instruments existent déjà. Dans le cas d’une sous-enchère salariale abusive et répétée dans une branche, les autorités ont la possibilité d’édicter un contrat-type de travail qui fixe des salaires minimaux. Dans le canton de Fribourg, un tel contrat-type de travail existe par exemple pour l’économie domestique. Il est également possible d’étendre à toute une branche les salaires minimaux définis dans une convention collective de travail, avec l’accord des partenaires sociaux.
Investissement dans la formation et la formation continueLa formation et la formation continue réduisent pour toutes les personnes salariées le risque de percevoir un salaire insuffisant pour vivre. Elles constituent également un moyen efficace pour prévenir la pauvreté.
ConclusionLe Conseil d’Etat ainsi que la majorité du Grand Conseil estiment que les mesures prônées par l’initiative ne permettront pas d’atteindre les objectifs visés. Pour ces raisons, ils recommandent de rejeter l’initiative. Un partenariat social responsable, les instruments de lutte contre la sous-enchère salariale et l’investissement dans la formation constituent des moyens plus efficaces pour garantir des salaires décents et un marché de l’emploi performant.
Les débats parlementaires
Le Grand Conseil s’est penché deux fois sur ce sujet.Le 1er juillet 2024, il a déclaré l’initiative législative pour un salaire minimum valide. Le 25 juin 2025, la majorité du Grand Conseil (63 voix contre 33 et 1 abstention) a décidé de rejeter l’initiative et de ne pas proposer de contre-projet.
Lors du débat parlementaire, les député-e-s, dans leur majorité, ont constaté que l’initiative représente des risques pour l’économie et le marché du travail. Les critiques concernaient les effets négatifs sur l’attractivité de la formation professionnelle et l’intégration des personnes peu qualifiées au marché du travail. Selon la majorité des parlementaires, l’application d’un salaire minimum uniforme fragiliserait des personnes déjà vulnérables, par exemple les jeunes sans expérience professionnelle, les personnes en situation de handicap ou encore les migrantes et migrants. La crainte d’une augmentation du travail au noir a été évoquée si l’initiative était acceptée.
Le salaire minimum légal proposé a été considéré comme trop élevé, notamment dans les secteurs sous pression qui peinent à maintenir leur rentabilité. Son introduction pourrait donc conduire à la suppression d’emplois. Enfin, les parlementaires ont mis en doute l’efficacité de la mesure en termes de lutte contre la pauvreté.
Pour la majorité des député-e-s, les négociations directes entre les associations des employeurs et les syndicats, dans le cadre du partenariat social, doivent permettre d’améliorer la situation des personnes concernées par des salaires précaires.
Pour une minorité des parlementaires, l’introduction d’un salaire minimum légal répond à une nécessité sociale et contribue à la dignité humaine. Les défenseurs de l’initiative sont d’avis qu’une telle mesure n’aurait pas d’effets négatifs sur le marché du travail. Ils sont également convaincus que la mesure permettrait de réduire la précarité dans le canton et d’aider les personnes concernées par des bas salaires à sortir de l’aide sociale. En outre, l’initiative serait utile pour lutter contre les inégalités entre les genres, les femmes étant généralement surreprésentées dans les secteurs concernés par des bas salaires. Enfin, pour ce qui est du partenariat social, les député-e-s favorables à l’initiative ont rappelé que le salaire minimum ne déploie pas ses effets dans l’ensemble des secteurs de l’économie.
Questions fréquentes
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L’initiative propose un salaire minimum de 23 francs de l’heure. Ce montant ne comprend pas les indemnités payées pour vacances et jours fériés. Lorsque la personne n’a pas de vacances payées, elle a droit à une indemnité. Cette indemnité représente 8,33 % du salaire horaire pour 4 semaines de vacances et 10,64 % pour 5 semaines de vacances. L’indemnisation des jours fériés pour les personnes payées à l’heure dépend du contrat de travail. A titre d’exemple, 6 jours fériés rémunérés par année civile correspondent à une indemnisation de 2,36 % du salaire horaire.En résumé, pour une personne salariée qui a droit à 4 semaines de vacances et 6 jours fériés rémunérés par année, le salaire minimum de 23 francs de l’heure proposé par l’initiative correspond à un salaire brut effectif de 25,46 francs de l’heure. Le versement d’un 13e salaire n’a pas d’incidence sur le salaire horaire brut exigé par l’initiative. Le montant correspondant au 13e salaire serait en effet compris dans le salaire horaire de 23 francs de l’heure.Le salaire minimum légal de 23 francs de l’heure représente un salaire mensuel de 4 186 francs sans 13e salaire et à 3 864 francs avec un 13e salaire. L’exemple de calcul est basé sur 182 heures de travail par mois.
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D’après les résultats de l’enquête suisse sur la structure des salaires, en 2022, environ 6 500 personnes travaillant à plein temps gagnaient moins de 23 francs de l’heure. Cette enquête couvre uniquement les secteurs secondaire et tertiaire, c’est-à-dire l’industrie et les services, et les entreprises qui ont au moins trois emplois.
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Les secteurs les plus concernés sont les activités de service comme la blanchisserie-teinturerie, la coiffure et les soins de beauté, l’hébergement et la restauration ainsi que les arts, les spectacles et les activités récréatives.
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Le partenariat social désigne la collaboration entre les associations patronales et les associations des travailleuses et travailleurs, pour définir les conditions de travail. Les conventions collectives de travail sont le principal instrument du partenariat social. Elles comprennent généralement des dispositions sur les salaires, les conditions de travail, les droits et devoirs des signataires ainsi que le contrôle et l’exécution. Dans le canton de Fribourg, de nombreuses conventions collectives de travail sont appliquées.
Direction de l’économie, de l’emploi et de la formation professionnelle
Information de contactPublié par Direction de l’économie, de l’emploi et de la formation professionnelle
Dernière modification : 31.10.2025