mardi 24 avril 2001, Regions

Politique scolaire: «Le canton ne doit
pas faillir à ses responsabilités»

CONSTITUANTE · Le groupe socialiste a rédigé un rapport sur la formation
et plaide entre autres pour une prise en charge complète de la scolarité
obligatoire par le canton.

JEAN GODEL

Le groupe socialiste de la Constituante n'est sans doute pas le seul à mener
une réflexion de fond au moment d'attaquer le vaste chantier de la révision de
la Constitution fribourgeoise. Mais jusqu'à présent, force est de constater
qu'il est le seul à communiquer le résultat de ses cogitations...
«Pour commencer, il faut donner du sens à des concepts», a donc soutenu
hier la délégation du groupe socialiste lors de la présentation d'un rapport de
25 pages consacré à la politique scolaire et à la formation. Un rapport rédigé
par cinq constituants socialistes sous la responabilité de Stéphane Sugnaux
(Vuisternens-devant-Romont). Point de règlement de détail donc, mais des
réflexions, des lignes de force, en partie nourries d'une vaste consultation
des milieux professionnels et académiques concernés. Au final, ce rapport a
été adopté par l'ensemble du groupe socialiste lors d'une journée de
réflexion tenue au début du mois d'avril. Pour beaucoup, les thèses
dévelopées reprennent celles qui sous-tendent le système éducatif
fribourgeois. Mais avec çà et là des approfondissements voire quelques
percées. Ainsi de l'affirmation du principe d'une cantonalisation accrue en
matière de scolarité obligatoire. But recherché: des conditions équivalentes
dans chaque établissement public du canton. Bref, l'égalité des chances
pour tous. Le hic, pour les socialistes, c'est que le système actuel fait en
partie dépendre son organisation des communes, lesquelles partagent
certaines responsabilités avec le canton. Or, toutes les communes ne sont
pas logées à la même enseigne et les socialistes craignent l'avènement
d'un système éducatif à deux vitesses.

DES INÉGALITÉS À GOMMER

«Il existe des inégalités que nous souhaitons voir disparaître, explique Alain
Berset (Belfaux), président du groupe socialiste. L'Etat doit assumer seul la
responsabilité des orientations pédagogiques et le financement du
fonctionnement de l'enseignement.» Le rapport estime même que l'Etat
«faillirait à sa mission de pourvoyeur d'une école obligatoire de qualité et
gratuite en abandonnant cette responsabilité aux communes.»

SAVOIR SÉQUESTRÉ

Dans la foulée, le groupe propose d'obliger l'Etat à mettre à disposition des
structures préscolaires pour les enfants dès trois ans. Outre les bienfaits
attendus d'une scolarisation précoce, ce système répond, dans l'esprit des
socialistes, «aux besoins des enfants dans la société du XXIe siècle» et
prend en compte la réalité de la vie sociale actuelle: travail des femmes,
accueil extrascolaire, politique familiale... Toujours pour aplanir la diversité
des situations d'une commune à l'autre, le rapport propose la mise en place
d'établissements régionaux, seuls capables de relever un tel défi.
Parmi les nombreuses thèses défendues, Ambros Lüthi (Fribourg) a plaidé
pour la défense d'un accès facilité aux écoles supérieures «et pas
seulement pour ceux qui en ont les moyens». Enfin, le rapport défend l'idée
selon laquelle les connaissances sont un bien public: «Pas de
séquestration du
savoir!» Au contraire, la coopération tous azimuts s'impose «pour faire
reculer la tendance à l'appropriation privée des connaissances». En outre,
en tant que bien public, l'éducation se situe au-delà du marché: le message
s'adresse à l'enseignement supérieur, enclin à répondre aux appels du pied
de l'économie, friande de diplômés immédiatement utilisables: «Le danger
peut-être grand d'instrumentaliser l'école», constate le rapport.
Comme pour faire écho à la publication de ce rapport, Stéphane Sugnaux a
annoncé hier la création, début mai, d'un nouveau groupe au sein de la
Constituante baptisé «Education et formation». Il réunira des constituants de
toutes tendances intéressés par le sujet. JnG