mardi 10 avril 2001, Regions

En premier plat, les commissions
épluchent les options possibles

CONSTITUANTE · Invité par l'une des 8 commissions thématiques, entrées
dans le vif du sujet, le prof. Hänni est venu disserter sur l'utilité d'un
catalogue des tâches de l'Etat.

JEAN GODEL

Si le propos de l'audition du jour semblait a priori ardu (Principes régissant
les tâches de l'Etat), les cakes et autres tartelettes aux myrtilles servis à
l'heure du thé auront sans doute contribué à le rendre plus digeste.
Présidée par la socialiste Erika Schnyder (Villars-sur-Glâne), la commission
3 de la Constituante fribourgeoise-tâches de l'Etat et finances-entendait hier
à l'hôpital Daler de Fribourg l'exposé de Peter Hänni, professeur de droit à
l'Université de Fribourg et membre du comité de suivi de la Constituante.
Histoire d'éplucher les options possibles.
L'une des questions auxquelles la commission devra répondre paraît
pourtant simple: faut-il oui ou non établir un catalogue des tâches de l'Etat
dans la future Constitution (la question du contenu d'un tel catalogue n'étant
pas encore à l'ordre du jour)?
Parmi les cantons ayant révisé leur Charte fondamentale, le Tessin a
répondu non: le Grand Conseil décide seul des tâches assignées au canton.
Berne a au contraire voulu un catalogue complet qui précise en outre
l'organe responsable de l'éxécution des tâches prévues. Neuchâtel enfin se
situe à mi-chemin: un seul article énumère des tâches très générales. «Il n'y
pas à se demander si telle ou telle solution est progressiste ou rétrograde,
martèle Peter Hänni: c'est un choix purement politique.»
Les arguments pour un tel catalogue? D'abord une plus grande légitimité
démocratique. Et puis c'est un symbole fort quant à l'état d'esprit de l'Etat. «Il
sera alors très intéressant de voir quelles tâches ne se trouveront pas dans
le catalogue...», s'amuse le professeur de droit.
Mais le poids d'une telle énumération peut aussi devenir un handicap:
«Exhaustif, le catalogue est fort peu flexible, vague, il ne veut plus rien dire»,
résume Peter Hänni. Surtout il peut devenir l'occasion de magistrales
batailles juridiques au Grand Conseil sur ce qui est du ressort du législateur
et ce qui ne l'est pas. Des batailles qui risquent d'occulter les débats de fond.
Se pose aussi la question de la sanction en cas de non-respect du
catalogue par les députés: ne sera-t-elle que politique, à l'occasion des
élections, ou faut-il introduire un recours pour déni de droit?

CHEVAUCHEMENTS DANGEREUX

Mais les écueils peuvent aussi être d'un tout autre ordre. L'expérience
rapportée par la constituante vaudoise Christelle Luisier, présente hier à
Fribourg, est significative et tient lieu d'avertissement. Pour n'avoir pas
délimité précisément tâches et principes généraux de l'Etat, parfois voisins,
ni n'avoir établi clairement les compétences des commissions quant à leur
examen, l'assemblée vaudoise a m ultiplié les débats parallèles et, partant,
les conflits lors des séances en plénum. «La première lecture a duré sept
mois au lieu des trois prévus», constate la Vaudoise. Autant désamorcer le
conflit en amont.
Si Erika Schnyder s'est plu à rappeler l'existence, à Fribourg, d'une
Conférence des présidents de commissions censée empêcher de tels
chevauchements, ainsi que de groupes de travail communs à plusieurs
commissions, elle a regretté de ne pas pouvoir encore disposer des
procès-verbaux des autres commissions. L'information à l'intérieur-même de
la Constituante a encore quelques ratés... JnG